Refaisons du conseil municipal un espace de délibération
Chaque semaine jusqu’aux élections municipales, nous vous proposons d’explorer une dimension de la démocratie locale ouverte. Cette semaine, découvrez comment refaire du conseil municipal un espace de délibération plus ouvert.
Pour les citoyens, le conseil municipal représente le cœur de la démocratie représentative dans leur commune. Pourtant, son fonctionnement est opaque pour nombre d’entre eux, qui le perçoivent de plus en plus comme une chambre d’enregistrement de délibérations préparées en amont. Quant aux élus des minorités, ils sont souvent réduits au rôle de simples observateurs.
Réenchanter l’idéal démocratique nécessite de rendre le conseil municipal plus transparent, plus participatif et plus collaboratif. Si son fonctionnement est très encadré par la loi, il existe une marge de manœuvre entre la règle et son interprétation pratique. De nombreuses initiatives peuvent s’y articuler pour nourrir, faire connaître et interroger le travail des élus.
Faire du Conseil municipal un lieu de délibération
Refonder la démocratie locale commence par rendre pleinement au conseil municipal sa fonction délibérative : il ne s’agit pas seulement de voter des “délibérations” au sens administratif, mais de faire dialoguer l’ensemble des élus (majorité et minorités) pour mieux dépasser les contradictions et construire collectivement des solutions d’intérêt général.
Pour introduire ce changement de culture dès le début du mandat, il peut être utile de rédiger une charte établissant les règles de fonctionnement de séance, adoptée par tous les élus : quelle expression pour la minorité ? quels droits et devoirs de chacun ? quel règles de débat ? Plutôt qu’une logique d’opposition systématique, la charte doit permettre d’adopter une posture de collaboration.
Associer les habitants et la société civile aux travaux du Conseil municipal
Dans les textes, le citoyen a le droit d’assister au conseil municipal, mais pas le droit de parole pendant la séance. Jouer sur le déroulé de séance permet cependant de créer des espaces de dialogue. Le Maire peut donner à la salle un temps de questions ou d’interpellation avant la séance ou encore la suspendre pour recueillir les avis de la minorité, des associations ou des citoyens présents, auxquels il se donnera l’obligation de répondre. Il est ainsi possible de donner aux habitants un pouvoir consultatif, voire d’interpellation, pendant le conseil municipal. Pour que les citoyens puissent plus facilement assister à la séance, il est possible de la délocaliser dans un autre lieu que la mairie. Le Code Général des Collectivités Territoriales l’autorise, à condition que ce lieu ne contrevienne pas au principe de neutralité, offre de bonnes conditions d’accessibilité permette la publicité des séances.
Pour associer plus directement la société civile à leurs travaux, les élus peuvent mettre en place des commissions extra-municipales. Il est préférable qu’elles portent sur un projet précis et qu’elles aient un mandat temporaire pour susciter l’engagement d’habitants non nécessairement politisés, et éviter leur noyautage par des minorités actives. A Kingersheim (Alsace), chaque projet important pour la collectivité est construit par un conseil participatif composé de citoyens tirés au sort, d’élus, d’experts et d’organisations (associations, syndicats, entreprises), en charge de préparer la décision qui sera prise par le conseil municipal. Cette méthode peut inspirer d’autres villes pour limiter les risques de technocratie ou de populisme, grâce à la collaboration de toutes les parties prenantes. Pour cette même raison, les commissions extra-municipales sont les instances idoines pour garantir les intérêts des générations futures, comme le propose le Pacte pour la Transition.
Enfin, les communes peuvent donner un droit d’interpellation locale aux habitants, comme Grenoble l’a mis en place entre 2016 et 2018 : si une pétition dépasse un certain seuil de signatures préalablement fixé, alors elle est mise à l’ordre du jour du Conseil municipal. Une démocratie plus ouverte passe aussi par la reconnaissance d’un pouvoir d’initiative citoyen.
Rendre accessible les travaux du Conseil municipal
Associer un certain nombre d’habitants est une chose, nourrir une relation de confiance avec le plus grand nombre en est une autre. Pour ce faire, il est indispensable de rendre accessible les travaux du conseil municipal via une traçabilité exhaustive des actes qui doivent être disponibles facilement, mais aussi par la diffusion d’une information compréhensible par l’ensemble des habitants.
En complément des courriers ou du magazine municipal, les supports visuels (vidéos explicatives, infographies, interviews) permettent d’informer les administrés avec pédagogie et de toucher un public plus diversifié. Les restitutions publiques, associées à un temps convivial sans formalisme et co-organisées avec les citoyens, sont un pas supplémentaire pour casser l’image de l’élu tout-puissant et nourrir une logique collaborative.
Pour conclure
Unique instance démocratique recueillant la confiance d’une majorité de Français, le conseil municipal est un symbole de la démocratie de proximité. Il n’a pas forcément vocation à se transformer en “agora citoyenne”, mais ne peut se résumer à une simple chambre d’enregistrement de décisions prises en amont. Redonnons-lui tout son sens en ouvrant des espaces de “délibération” avant, pendant et après la séance.
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